Articles du mois : juin 2015
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La lettre de change-relevé magnétique n’est pas soumise au formalisme de la lettre de change
La lettre de change-relevé magnétique ne repose pas sur un titre soumis aux conditions de validité de la signature du tireur et qu’elle constitue un simple procédé de recouvrement de créance dont la preuve de l’exécution relève du droit commun.
Un établissement bancaire, porteur d’une lettre de change-relevé magnétique avait, à la suite de la défaillance du tireur, poursuivi en paiement la personne qui s’était portée caution du règlement. La caution avait fait valoir que la lettre de change-relevé était irrégulière car elle ne comportait pas les mentions obligatoires prescrites par l’article L 511-1 du Code de commerce, en particulier la signature du tireur, avant que le banquier ne procède à la saisie informatique des données inscrites sur le titre papier.
La Cour de cassation a écarté cet argument, jugeant au contraire que la lettre de change-relevé magnétique ne repose pas sur un titre soumis aux conditions de validité de l’article L 511-1 précité et qu’elle constitue un simple procédé de recouvrement de créance dont la preuve de l’exécution relève du droit commun.
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Interdiction de sanctionner un salarié parce qu’il dénonce un harcèlement, sauf mauvaise foi
Lorsque la mauvaise foi du salarié n’est pas établie, le reproche fait à celui-ci, dans la lettre de licenciement, d’avoir accusé son employeur de harcèlement emporte à lui seul la nullité du licenciement, même si la lettre comporte d’autres griefs.
La chambre sociale de la Cour de cassation rappelle la protection dont bénéficient les victimes et témoins de faits de harcèlement, moral ou sexuel en application des articles L 1152-2 et L 1153-2 du Code du travail : l’employeur ne peut pas sanctionner ou licencier un salarié pour avoir dénoncé ou relatés de tels faits, même si ceux-ci ne sont pas établis. La seule limite à cette protection est la mauvaise foi de l’intéressé, laquelle ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits dénoncés.
Ainsi, lorsque la mauvaise foi du salarié n’est pas établie, le reproche fait à celui-ci, dans la lettre de licenciement, d’avoir accusé son employeur de harcèlement emporte à lui seul la nullité du licenciement, même si la lettre comporte d’autres griefs. De même, un tel motif ne peut pas être pris en considération dans l’appréciation d’éventuelles fautes d’un apprenti de nature à justifier la résiliation judiciaire du contrat d’apprentissage à ses torts.
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L’emploi des handicapés s’impose à tout établissement dont le chef recrute et licencie du personnel
Tout établissement occupant au moins 20 salariés est tenu à une obligation d’emploi de 6 % de personnes handicapées, mutilées de guerre ou assimilées. Dans les entreprises à établissements multiples, cette obligation concerne chaque établissement occupant au moins 20 salarié
Tout établissement occupant au moins 20 salariés est tenu à une obligation d’emploi de 6 % de personnes handicapées, mutilées de guerre ou assimilées. Dans les entreprises à établissements multiples, cette obligation concerne chaque établissement occupant au moins 20 salariés (articles L 5212-1 à art. L 5212-3 du Code du travail).
La notion d’établissement assujetti à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés est précisée par un décret du 10 juin 2015. Entérinant la position du Conseil d’Etat (arrêt du 10 novembre 1999 n° 196837), ce texte indique que cette notion s’entend d’un établissement dont le chef dispose d’un pouvoir de direction incluant le recrutement et le licenciement du personnel (article R 5212-1 modifié du Code du travail).
Ces mêmes établissements seront donc tenus de souscrire chaque année la déclaration obligatoire d’emploi des handicapés.
Les nouvelles dispositions s’appliquent depuis le 14 juin 2015, lendemain de la publication du décret au Journal officiel. Elles concerneront donc pour la première fois la déclaration portant sur l’année 2015, à souscrire au plus tard le 1er mars 2016.
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En cas de rectification, le calcul de l’ISF dû doit tenir compte du plafonnement
Le système du plafonnement a pour but d’éviter que le total formé par l’ISF et l’impôt sur le revenu n’excède 75 % des revenus de l’année précédente. L’excédent éventuel vient en diminution de l’ISF à payer.
Le système du plafonnement a pour but d’éviter que le total formé par l’ISF et l’impôt sur le revenu n’excède 75 % des revenus de l’année précédente. L’excédent éventuel vient en diminution de l’ISF à payer (CGI art. 885 V bis).
Qu’en est-il en cas de redressement ISF ? L’administration doit-elle d’emblée – spontanément ou sur demande du redevable – appliquer la règle de plafonnement ou faut-il attendre que l’imposition supplémentaire soit devenue définitive ?
La Cour de cassation vient de juger que l’administration doit appliquer les lois et règlements, fussent-ils en faveur du contribuable. Lorsqu’elle entend rectifier l’ISF dû par le contribuable, l’administration doit donc rechercher d’office si le plafonnement est applicable au cas d’espèce et en tirer immédiatement toutes les conséquences pour le calcul de l’impôt.
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La facturation aux clients de frais administratifs à des taux variables n’est pas présumée anormale
Il appartient à l’administration d’apporter la preuve du caractère anormal d’une telle facturation si elle entend rehausser le bénéfice imposable sur ce fondement.
Une société facture à ses clients des frais administratifs à des taux variant entre 0 % et 15 % du montant des services. L’administration considère qu’en ne facturant pas l’ensemble de ses clients à ce dernier taux la société a renoncé à percevoir des recettes qui lui étaient dues sans justifier d’un intérêt commercial.
Une telle pratique relève-t-elle d’une gestion commerciale anormale ?
Non, répond le Conseil d’Etat. La facturation de frais administratifs avec, le cas échéant, certaines réductions décidées dans l’intérêt de l’entreprise constitue un acte de gestion courant. Il appartient à l’administration d’apporter la preuve du caractère anormal d’une telle facturation si elle entend rehausser le bénéfice imposable sur ce fondement.
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Contrôle Urssaf : l’envoi de la lettre d’observations n’est soumis à aucun délai
À la fin d’un contrôle Urssaf, l’inspecteur du recouvrement doit, à peine de nullité de la procédure, communiquer à l’employeur un document comportant un certain nombre de mentions obligatoires et dénommé lettre d’observations.
À la fin d’un contrôle Urssaf, l’inspecteur du recouvrement doit, à peine de nullité de la procédure, communiquer à l’employeur un document comportant un certain nombre de mentions obligatoires et dénommé lettre d’observations.
L’article R 243-59 du Code de la Sécurité Sociale dispose simplement que cette communication doit être faite « à l’issue du contrôle ».
La Cour de cassation avait déjà précisé, dans des arrêts anciens, que cet envoi n’est soumis à aucun délai. Elle vient de confirmer sa position dans un arrêt publié.
En l’espèce, la lettre d’observations avait été adressée à l’employeur près de quinze mois après le dernier courrier de l’inspecteur du recouvrement. Malgré la longueur de ce délai, la Cour de cassation, tenant compte de la complexité de la législation contrôlée et de l’ampleur du redressement, a approuvé la cour d’appel d’avoir validé la procédure.
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L’administration encadre les conditions de prorogation de la réduction d’impôt Pinel
Pour les investissements locatifs dans le cadre du régime « Duflot-Pinel » le propriétaire du logement doit s’engager à le louer pendant six ou neuf ans. Cet engagement peut être prorogé de trois ans. Le bénéfice de la réduction d’impôt est prolongé d’autant.
Pour les investissements locatifs réalisés depuis le 1er septembre 2014 dans le cadre du régime « Duflot-Pinel » le propriétaire du logement doit s’engager à le louer pendant six ou neuf ans. Cet engagement peut être prorogé de trois ans (sa durée maximale passe ainsi à douze ans). Le bénéfice de la réduction d’impôt est prolongé d’autant.
L’administration précise les conditions du maintien de l’avantage fiscal.
La prorogation doit être demandée, l’année au cours de laquelle intervient le terme de la location, par la personne ayant souscrit l’engagement initial. Celle-ci ne peut exercer l’option que si elle est domiciliée en France cette année-là. Par ailleurs, elle doit louer le logement dans les mêmes conditions. Ainsi, pour les biens acquis jusqu’au 31 décembre 2014, elle reste tenue de louer à une personne autre qu’un membre de son foyer fiscal, mais aussi qu’un de ses ascendants ou descendants.
Enfin, aucune prorogation n’est possible si la réduction d’impôt a été remise en cause au titre de la période d’engagement de location antérieure. Si l’avantage fiscal initial est remis en cause après la prorogation, celui lié à la prorogation sera également remis en cause.
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Le salarié remplacé définitivement pendant son congé sabbatique doit accepter un poste similaire
Le salarié réintégrant l’entreprise après un congé sabbatique doit se contenter d’un poste similaire à celui initialement tenu si ce dernier est définitivement pourvu par un autre salarié.
Aux termes de l’article L 3142-95 du Code du travail, le salarié de retour d’un congé sabbatique doit retrouver son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente. Dans un arrêt du 3 juin 2015, la Cour de cassation précise l’étendue de l’obligation de réintégration à la charge de l’employeur.
Le salarié n’est réintégré dans son poste initial que si celui-ci est disponible
La Cour de cassation juge que la réintégration du salarié à l’issue de son congé sabbatique doit se faire en priorité
dans l’emploi initial. Ce n’est que si ce dernier est indisponible que la réintégration peut se faire dans un emploi équivalent. Cette règle a déjà été dégagée pour d’autres congés, tels le congé parental d’éducation (Cass. soc. 19-6-2013 n° 12-12.758 : RJS 10/13 n° 693) ou le congé de maternité (Cass. soc. 25-5-2011 n° 09-72.556 : RJS 8-9/11 n° 681).La Haute Juridiction considère comme indisponible
le poste pourvu de manière définitive par le recrutement d’un remplaçant sous contrat à durée indéterminée ou, comme en l’espèce, par mobilité interne.Il résulte donc de cet arrêt que l’employeur n’est pas tenu de laisser le poste du salarié en congé sabbatique disponible en se gardant de tout remplacement définitif ; il ne peut lui être reproché de ne pas recourir au contrat à durée déterminée ou au travail temporaire pour assurer ce remplacement.
Le salarié refusant un poste similaire peut être licencié
A défaut de pouvoir retrouver son poste initial, le salarié doit être réintégré dans un emploi similaire, c’est-à-dire un emploi n’entraînant aucune modification d’un des éléments essentiels du contrat
de travail que sont notamment les fonctions, les horaires, le lieu de travail.En l’espèce, à son retour de congé sabbatique, la salariée a été licenciée pour avoir refusé les propositions faites par son employeur à la suite de l’indisponibilité de son poste initial. La Cour de cassation approuve les juges d’appel qui, après avoir constaté que les postes proposés présentaient des caractéristiques semblables à celles du poste occupé avant le congé, ont considéré le licenciement justifié. L’employeur avait en effet satisfait aux obligations de réintégration que lui impose l’article L 3142-95 précité.
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ISF : un ensemble immobilier loué à un seul locataire vaut moins que s’il est loué à plusieurs
Louer à un même locataire un ensemble immobilier composé d’un appartement et de locaux à usage commercial permet d’appliquer une décote sur la valeur à déclarer à l’ISF plus importante que si les deux types de biens étaient occupés par des locataires différents.
Un contribuable déclare à l’ISF un ensemble immobilier composé d’une part d’un appartement de 90 m2 et d’autre part d’ateliers, de salles de cours et d’une galerie d’art d’une superficie de 518 m2. Le tout loué à une société. L’administration le redresse pour insuffisance d’évaluation.
Faute d’éléments de comparaison sur des biens composés d’une part d’un appartement d’autre part d’un ensemble de locaux à usage commercial, l’administration procède à une évaluation séparée des deux types de biens par comparaison avec des biens libres et pratique une décote de 20 % pour tenir compte de leur situation locative.
Pour la cour d’appel, l’abattement de 20 % est insuffisant ; la situation particulière des biens résultant de leur occupation par un même locataire doit entraîner l’application d’un abattement plus important que si les deux types de biens étaient loués à deux locataires différents. -
Droits de vente d’immeubles : peu de changements à compter du 1-6-2015
Comme chaque année, l’administration a diffusé les informations relatives au droit de vente d’immeubles applicables à compter du 1er juin, à la suite des délibérations des collectivités territoriales. La tendance est à la stabilité.
Aucun nouveau département n’a ainsi usé de la faculté de majorer le taux de droit commun du droit départemental
à compter du 1er juin 2015. Pour les sept départements (dont Paris) ayant maintenu ce taux à 3,80 %, une telle majoration sera toutefois possible à compter du 1er janvier 2016 (délibération notifiée avant le 30 novembre 2015) ou du 1er mars 2016 (délibération notifiée au plus tard le 31 janvier 2016).Les abattements
, exonérations et taux réduits facultatifs
votés par les conseils départementaux l’an dernier ont été reconduits pour la période du 1er juin 2015 au 31 mai 2016. Deux nouveaux départements ont voté l’exonération des acquisitions de logements par certains organismes HLM en cas de mise en œuvre de la garantie de rachats (CGI art. 1594 H-0 bis) : les Côtes d’Armor et le Vaucluse.